1. M Ce film fait écho – et même il anticipe – la philosophie des Lumières et le combat de la raison (de la liberté du jugement) contre l’ignorance et l’obscurantisme.
    Ce film montre que la défense des valeurs :
    – d’autonomie : oser penser par soi-même,
    – de tolérance : le droit de combattre des idées et non des personnes,
    – et de liberté d’expression : le droit de tout dire dans les limites prescrites par la loi,
    sont plus que jamais d’actualité : non seulement avec les fanatismes religieux mais avec la soumission inconsciente à toutes les formes d’autorité, morales, politiques, sociales… On peut se demander si contrairement à la fin du film, la croyance et l’obéissance n’ont pas tendance à triompher sur la liberté de jugement et la réflexion ?
  2. Ce qui m’a frappé dans ce film : on retrouve cette progression de l’intégrisme, dans cette capture d’esprits vulnérables, avec les mêmes mécanismes que ceux, des siècles plus tard, décrits  dans le documentaire sur la scientologie, projeté en aout.
  3. Dans ce processus d’intégrisme qui se développe, gardons nous d’oublier le rôle joué par ceux qui, en haut, tirent les ficelles  pour accroitre leur pouvoir ; il faut voir au delà des fanatisés, et c’est vrai encore aujourd’hui
  4. Le film semble opposer frontalement liberté d’interpréter et de juger ET l’obéissance à une autorité extérieure.
    Or la société, pour exister et fonctionner, requiert une dose d’obéissance, au moins à la loi. L’éducation sans une “soumission”  initiale au “maître” peut-elle vraiment être féconde ?
    Pascal disait : “Il faut savoir douter où il faut, croire où il faut, se soumettre où il le faut.” C’est souligner les dangers d’une liberté livrée à elle-même : on tombe alors dans les travers du relativisme où une opinion se trouve justifiée dès qu’elle est prononcée et défendue par un individu…
  5. c’est une reconstitution historique avec quelques anachronismes, pour servir un propos ; par exemple l’inquisition est venue plus tard que le 12ème siècle
  6. Certes, Averroes incite les gens à penser mais il y a possibilité de dérives  avec ceux qui le suivent en le voyant comme un ange. Il y a ce point commun
  7. la grande différence c’est que Averroes pousse les gens à agir par eux mêmes
  8. Mais il y a des gens qui ont des problèmes et qui ont besoin de se sentir conduits,guidés
  9. N’oublions pas qu’en France, récemment,  il y a eu 300 morts, soit un demi Ouradour ; et ce ne sont pas les catholiques qui ont tué. Chahine dénonce l’intégrisme avec sa violence. On ne peut tout ramener à la psychologie. Certains nazis n’étaient pas malheureux.
  10. Vrai, on a tendance à réduire la violence à des causes psychologiques alors qu’elle procède aussi de rapports de force.
    Mais alors attention : pour respecter les faits, il ne faut pas oublier non plus les 300 000 morts, ou plus, victimes de guerres et de bombardements menées par l’Occident pour des motifs douteux ou même mensongers ; et les millions de personnes exilées…
  11. Dommage qu’il y ait peu d’Averroes aujourd’hui.
  12. On peut dire que Noam Chomsky  88 ans est un Averroes  actuel. Quand on le lit, c’est lumineux, on se sent intelligent. Nos medias parlent très peu de lui, ils ne l’aiment pas.
    Venu en France recevoir un prix, il a été boudé par l’Assemblée nationale car ses propos dérangent, notamment en géopolitique.
  13. Les phénomènes de fanatisme et divers problèmes psychologiques sont liés au fait que sans croyance ou sans idéal les gens sont attirés par les extrémismes.
    Faute de trouver un sens dans leurs vies, ils sont happés par l’aventure du fanatisme.
    Le manque de vie spirituelle conduit à une déstructuration philosophique, à la perte des repères classiques. Ils sont alors en recherche d’une sortie de secours vers l’absolu
  14. Chahine souligne que l’ignorance peut mener à cette emprise. Averroes reproche au jeune prince de ne connaitre aux mathématiques. C’est la satisfaction de l’ignorant.
  15. la déstructuration de l’individu est induite par une perte de repères, à laquelle contribue la société de consommation en mettant l’accent sur des désirs à satisfaire immédiatement, au détriment de se cultiver en profondeur – ce qui conduit à l’ignorance
  16. sur les causes du fanatisme : il s’agit moins de l’ignorance elle-même ou du vide de sens (que peuvent éprouver jeunes et moins jeunes…) que de l’absence de reconnaissance de cette ignorance ou de ce vide en chacun. L’ignorance qui s’ignore elle même la pire.
    Autrement dit, c’est la négation ou le refus d’accepter nos limites, nos faiblesses qui fait le lit du fanatisme – une forme radicalisée du dogmatisme.
    La démocratie, au contraire du fanatisme, repose sur l’acceptation du désaccord, de la discorde : on est d’accord sur le fait de ne pas être d’accord… seul cet accord garantit tolérance, liberté d’expression et respect de l’autre.
  17. On a proposé comme causes des actes terroristes le manque de spiritualité, l’ignorance, la pauvreté, l’inégalité, l’hégémonie sur le monde.
    Moi j’ai retenu qu’une attaque par un drone c’était 10 terroristes de plus.
    Et qu’à la montée du fanatisme répond la montée du populismePar ailleurs pour ce qui est de l’absence de savoirs, je réponds qu’une tête bien faite vaut mieux qu’une tête bien pleine. C’est toujours plus facile de rabaisser les autres plutot que de se mettre à leur hauteur.Enfin ma liberté n’est pas de faire ce que je veux : elle finit là où commence celle des autres
  18. La communauté subit une  perte de repère,  ce qui constitue une maltraitance et l’individu recherche un groupe où il se repère. On peut le voir dans le processus du film ou dans celui de la scientologie. C’est vieux comme le monde.  L’esprit critique prend du temps.
    La diversion, la distraction,  la TV sont la fin de la réflexion par soi même
  19. On  a oublié de dire que les parents doivent mettre des limites, apprendre le respect entre frères et sœurs. Il faut revenir dans nos maisons ; et voir pourquoi les jeunes ne savent plus où ils habitent.
  20. Ah le retour à la maison…Chaque fois que l’économie a eu besoin des femmes il y a eu une poussée du féminisme – par exemple en 45 après la guerre. Mais quand on n’en a plus besoin on dit aux femmes de retourner à la maison pour éduquer les enfants.
    Mais je pense en effet qu’un enfant a besoin d’un tuteur pour grandir, pour pousser droit ; ensuite il coupera les liens et choisira ceux qu’il désire mettre en place.
  21. Je porte un regard critique sur la fin où l’on voit la pensée gagner sur la  non pensée, la victoire d’Al Mansour sur les islamistes..
  22. en réalité ce sont les islamistes qui ont gagné cette bataille ; mais au niveau de l’histoire ce sont les catholiques qui sont arrivés au pouvoir en jouant des rivalités entre musulmans.
  23. Il faut nous remettre dans le contexte des années 90. En 95 il y a eu un attentat avec un car entier de tués en Allemagne ; en 97 Chahine fait son film. Souvenons nous de Salman Rushdi – c’est d’ailleurs le nom arabe d’Averroes – et de la fatwa à son encontre. De Joseph Anton : Vie de Rushdie pendant la fatwa
    Chahine a été un militant qui a eu des problèmes. Avec Patrice Chéreau ils ont monté Bonaparte, une pièce contre les islamistes. A l’époque il y  avait un mouvement intégriste en Algérie   Il y a des rapports très compliqués  entre religion et science
  24. A signaler : livre d’Aldo Naouri sur l’éducation ; émission sur France inter de 13 à 14h: renseignement, radicalisation  et théorie du complot  du 8 octobre 2016
  25. Attention à ne pas confondre islam et islamisme, religion et religion radicalisée  cf le isme du suffixe. C’est une manipulation dans le but d’acquérir du pouvoir. Il ne faut pas stigmatiser mais plutôt clarifier : l’islamisme est la déviation d’une religion
  26. quelle différence entre dogme et religion ? le dogme est une idéologie révélée, il ne se discute pas. La religion a une part de révélation, mais elle peut s’interpréter.
  27. En conclusion, que pouvons nous faire pour éviter le fanatisme ?
    D’abord ne pas esquiver ses propres responsabilités.  Avoir toujours un esprit critique, garder le doute existentiel, se poser des questions pour éviter fausses certitudes et radicalisme
    Nous voilà renvoyés à la fiabilité et à la diversité de nos sources d’information !