LES JOURS HEUREUX : vendredi 18 aout, 18H à la FOL Taragnat

Projection / Débat : LES JOURS HEUREUX

Ouvert à tous et gratuit y compris aux non adhérents,

Programme du CNR, Conseil National de la Résistance

« Résister ne suffira pas pour construire un avenir  meilleur. Il s’agit aujourd’hui d’appeler à un projet de société, d’appeler les mouvements, les associations , les institutions, les syndicats, les partis politiques , comme l’ont fait les treize résistants en mars 2004, à constituer un programme politique , économique et social du XXI siècle ,reprenant les principes du CNR en les adaptant à notre époque, en prenant en compte les problématiques écologiques et environnementales. Il s’agit de proposer des pistes de réflexion, d’union et d’action. »

       2010 rassemblement des Glières, Didier Magnin, président du CRHA* ( voir note à la fin) 

Composition du CONSEIL NATIONAL DE LA RESISTANCE

Créé le 27 mai 1943 – 48 rue du Four – Paris

Président :

Jean MOULIN, puis Georges BIDAULT (démocrates –chrétiens)

et, à la libération le 15 septembre 1944, Louis SAILLANT de la CGT

Membres :

Libération sud : Pascal COPEAU, supplée par Pierre HERVE (désigné par son mouvement, Emmanuel     d’ASTIER DE LA VIGERIE, appelé à Alger à l’Assemblée consultative puis au gouvernement        provisoire, redevient le titulaire à la libération)

OCM (Organisation Civile et Militaire) : Jacques-Henri SIMON, déporté remplacé par Maxime BLOCQ-         MASCART

Combat : Claude BOURDET, déporté, remplacé par  Marcel DEGLIAME

Ceux de la résistance (CDLR) : Jacques LECOMPTE-BOINET

Franc-tireur : Claudius PETIT, puis Jean Pierre LEVY, puis Antoine AVININ

Ceux de la libération : Roger COQUOIN, fusillé, remplacé par André MUTTER

Libération Nord : Charles LAURENT, appelé à Alger (Assemblée consultative) remplacé  par Henri RIBIERE

Front national de lutte pour la libération et l’indépendance : Pierre VILLON

Parti radical et radical socialiste : Marc RUCARD, appelé à Alger (Assemblée consultative) remplacé par Paul         BASTID

Démocrates-chrétiens : Georges BIDAULT puis André COLIN

Fédération républicaine et républicains nationaux : Jacques DEBU-BRIDEL

Parti communiste : André MERCIER, appelé à Alger (Assemblée consultative) remplacé par Auguste GILLOT

Alliance démocratique : Joseph LANIEL

Parti socialiste : André LE TROQUER, appelé à Alger (Assemblée consultative) remplacé par Daniel MAYER

Confédération Générale du Travail : Louis SAILLANT, puis Benoît FRACHON

Confédération Française des Travailleurs Chrétiens : Charles TESSIER

Secrétaire général : Pierre MEUNIER

Secrétaire général adjoint : Robert CHAMBEIRON

 

Les étapes d’écritures du programme

Début 1943 le journal « Le Populaire » du comité d’action socialiste propose « Notre programme » à ses lecteurs.

En juillet 1943 André Philip (SFIO) soumet un premier texte au CNR.

En  août 1943   la CGT présente « un programme d’action ».

En novembre 1943 le Front National** (voir note à la fin) propose son « projet d’une charte de la Résistance.

Le texte « programme d’action de la Résistance » sera adopté à l’unanimité par le CNR le 15 mars 1944 et publié sous le titre « Les jours heureux » pour la première fois le 24 mars 1944.

Le texte

Le programme du CNR est adopté à l’unanimité et  publié pour la première fois le 24 mars 1944 sous le titre «  Les jours heureux ».

La première partie est un plan d’action pour permettre la libération du territoire national et la victoire sur le fascisme :

« Ainsi par l’effort et les sacrifices de tous sera avancée l’heure de la libération du territoire national ; ainsi la vie de milliers de Français pourra être sauvée et d’immenses richesses pourront être préservées.

Ainsi dans le combat se forgera une France plus pure et plus forte, capable d’entreprendre au lendemain de  la libération la plus grande œuvre de reconstruction et de rénovation de la patrie. »

La deuxième partie expose les mesures à appliquer dès la libération du territoire. C’est cette partie que nous reprenons in extenso ci-dessous car elle concerne toujours notre vie quotidienne, nos revendications et nos luttes syndicales.

« Mesures à appliquer dès la libération du territoire

    Unis quant au but à atteindre, unis quant aux moyens à mettre en œuvre pour atteindre ce but qui est la libération rapide du territoire, les représentants  des  mouvements,  groupements, partis ou tendances politiques groupés au sein du CNR proclament qu’ils sont décidés à rester unis après la libération.

1)  Afin d’établir le gouvernement provisoire de la République formé par le général de Gaulle pour défendre l’indépendance politique et économique de la Nation, rétablir la France dans sa puissance, dans sa grandeur et dans sa mission universelle.

2)  Afin de veiller au châtiment des traitres et à l’éviction dans le domaine de l’administration et de la vie professionnelle de tous ceux qui ont pactisé avec l’ennemi ou qui se seront associés activement à la politique des gouvernements de collaboration.

3)  Afin d’exiger la confiscation des biens des traîtres et des trafiquants du marché noir, l’établissement  d’un impôt progressif sur les bénéfices de guerre et plus généralement sur les gains réalisés au détriment du peuple et de la Nation pendant la période d’occupation, ainsi que la confiscation de tous les biens ennemis, y compris les participations acquises depuis l’armistice par les  gouvernements de l’Axe et par leurs ressortissants dans les entreprises françaises et coloniales de tout ordre, avec constitution de ces participations en patrimoine national inaliénable.

4)  Afin d’assurer :

   l’établissement de la démocratie la plus large en rendant la parole au peuple français par le rétablissement du suffrage universel ;

    la pleine liberté de pensée, de conscience et d’expression ;

–     la liberté de la presse, son honneur et son indépendance à l’égard de l’Etat, des puissances d’argent et des influences étrangères :

–     la liberté d’association, de réunion et de manifestation ;

–     l’inviolabilité du domicile et le secret de la correspondance ;

–     le respect de la personne humaine ;

–     l’égalité absolue de tous les citoyens devant la loi ;

5)  Afin de promouvoir les réformes indispensables :

  1. a) sur le plan économique :

     l’instauration d’une véritable démocratie économique et sociale, impliquant l’éviction des grandes féodalités économiques et financières de la direction de l’économie ;

     une organisation rationnelle de l’économie assurant la subordination des intérêts particuliers à l’intérêt général et affranchie de la dictature professionnelle instaurée à l’image des Etats fascistes ;

     l’intensification de la production nationale selon les lignes d’un plan arrêté par l’Etat après consultation des représentants de tous les éléments de cette production ;

     le retour à la Nation des grands moyens de production monopolisés, fruit du travail commun, des sources d’énergie, des richesses du sous-sol, des compagnies d’assurances et des grandes banques ;

     le développement et le soutien des coopératives de production, d’achat et de ventes, agricoles et artisanales ;

     le droit d’accès dans le cadre de l’entreprise, aux fonctions de direction et d’administration pour les ouvriers possédant les qualifications nécessaires, et la participation des travailleurs à la direction de l’économie ;

  1. b) sur le plan social :

     le droit au travail et le droit au repos, notamment par le rétablissement et l’amélioration du régime contractuel du travail ;

     un rajustement important des salaires et la garantie d’un niveau de salaire et de traitement qui assure à chaque travailleur et à sa famille la sécurité, la dignité et la possibilité d’une vie pleinement humaine ;

     la garantie du pouvoir d’achat national par une politique tendant à la stabilité de la monnaie ;

    la reconstitution dans ses libertés traditionnelles, d’un syndicalisme indépendant, doté de larges pouvoirs dans l’organisation de la vie économique et sociale ;

     un plan complet de sécurité sociale, visant à assurer à tous les citoyens des moyens d’existence, dans tous les cas où ils sont incapables de se les procurer par le travail, avec gestion appartenant aux représentants des intéressés et de l’Etat ;

    la sécurité de l’emploi, la réglementation des conditions d’embauchage et de licenciement, le rétablissement des délégués d’atelier ;

     l’élévation et la sécurité du niveau de vie des travailleurs de la terre par une politique de prix agricoles rémunérateurs, améliorant et généralisant l’expérience de l’office du blé, par une législation sociale accordant aux salariés agricoles les mêmes droits qu’aux salariés de l’industrie, par un système d’assurance contre les calamités agricoles, par l’établissement d’un juste statut du fermage et du métayage, par des facilités d’accession à la propriété pour les jeunes familles paysannes et par la réalisation d’un plan d’équipement rural ;

     une retraite permettant aux vieux travailleurs de finir dignement leurs jours ;

     le dédommagement des sinistrés et des allocations et pensions pour les victimes de la terreur fasciste .


  1. c
    ) Une extension des droits politiques, sociaux et économiques des populations indigènes et coloniales.

  2. d
    ) La possibilité effective pour tous les enfants français de bénéficier de l’instruction et d’accéder à la culture la plus développée quelle que soit la situation de fortune de leurs parents, afin que les fonctions les plus hautes soient réellement accessibles à tous ceux qui auront les capacités requises pour les exercer et que soit ainsi promue une élite véritable, non de naissance mais de mérite, et constamment renouvelée par l’apport populaire.

Ainsi sera fondée une République nouvelle qui balaiera le régime de basse réaction instauré par Vichy et qui rendra aux institutions démocratiques et populaires l’efficacité que leur avaient fait perdre les entreprises de corruption et de trahison qui ont précédé la capitulation. Ainsi sera rendue possible une démocratie qui unisse au contrôle effectif exercé par les élus du peuple la continuité de l’action gouvernementale.

L’union des représentants de la Résistance pour l’action dans le présent et dans l’avenir, dans l’intérêt supérieur de la patrie, doit être pour tous les Français un gage de confiance et un stimulant. Elle doit les inciter à éliminer tout esprit de particularisme, tout ferment de division qui pourrait freiner leur action et ne servir que l’ennemi.

En avant donc, dans l’union de tous les Français rassemblés autour du CFLN et de son président le général de Gaulle !

En avant pour le combat, en avant pour la victoire, afin que VIVE LA FRANCE !

Le Conseil national de la Résistance »

Mise en oeuvre du programme du CNR de 1944 à 1946

Le 27 juillet 1944, une des mesures figurant dans le programme du CNR est accomplie avant la libération de Paris : le GPRF d’Alger rétablit la liberté syndicale et abolit la Charte du travail. 

Entre décembre 1944 et octobre 1945, le gouvernement provisoire est amené à prendre une série d’ordonnances allant dans le sens des mesures préconisées par le programme du CNR :

De nettes divergences apparaissent entre le programme du MRP, publié le 8 novembre, et celui de la gauche deux jours après. Le programme du MRP prévoit la nationalisation de la Banque de France, mais pas celle des autres banques. Par contre, le périmètre des entreprises n’est pas moins vaste que celui des gauches, mais les modalités de gestion de l’État sont diverses, depuis la régie d’État jusqu’à la coopérative de production. Les gauches, tout comme le MRP, souhaitent revoir l’ordonnance du 22 février sur les comités d’entreprise pour introduire la participation des ouvriers à la gestion.

  • 2 décembre 1945, nationalisation de la Banque de France et de quatre grandes banques de dépôt.
  • 18 janvier 1946, dépôt à l’Assemblée de projets de loi sur la nationalisation de l’électricité et du gaz.

 L’adoption de la loi sur la nationalisation de l’électricité et du gaz est laborieuse, le MRP et la SFIO souhaitant un système plus décentralisé que celui proposé par le ministre communiste Marcel Paul. Les députés MRP votent finalement la loi après avoir déposé 77 amendements qui ne furent généralement pas adoptés. Les nationalisations des compagnies d’assurances sont également une source de dissension entre les communistes qui demandent la nationalisation totale du secteur alors que les socialistes ne demandent que la nationalisation de 48 compagnies, représentant 65 % du secteur. 

série de mesures  adoptée par l’Assemblée constituante  du 23 au 26 avril  :

  • 21 février 1946, rétablissement de la loi des quarante heures ;
  • 28 mars 1946, vote de la loi sur la nationalisation de l’électricité et du gaz ;
  • 24 avril 1946, nationalisation des grandes compagnies d’assurances ;
  • 25 avril, extension du nombre et des attributions des comités d’entreprises ;
  • 26 avril 1946, généralisation de la Sécurité sociale incluant la Retraite des vieux.

Le référendum constitutionnel du 5 mai est un échec pour les partis de gauche et par conséquent un succès pour le MRP qui prônait le non. L’Assemblée est dissoute et le MRP devenant le premier parti de France, l’un de ses membres, Georges Bidault, devient Premier ministre. Il n’y a plus de consensus pour aller plus loin dans les nationalisations. Le PCF est seul à proposer la nationalisation des ressources thermales et de la sidérurgie. La loi sur le statut de la fonction publique (19 octobre 1946), présentée par Maurice Thorez est la seule que l’on puisse qualifier de réforme de structure.

Et depuis :

1968  les luttes apportent une augmentation de 25 % du SMIG (crée en 1950), qui devient SMIC indexé sur le taux de croissance et l’indice des prix, et une augmentation de 10 % des autres salaires, l’assurance chômage généralisée et des prestations élargies, la quatrième semaine de congés payés.

On peut estimer qu’un certain nombre de mesures prises après 1981 étaient conformes au programme du CNR : 1982 : les nationalisations, le 13 février  [la quasi-totalité du  secteur financier, contre l’avis de Delors et Rocard passe sous contrôle de l’Etat, sauf les banques d’affaires],

les lois Auroux [39 heures, 5° semaine de congés payés, représentation des salariés dans les CA des entreprises] l’âge légal de départ à la retraite avancé de 65 à 60 ans;

1983  la loi Anicet LE PORS du 13 juillet définissant «  les droits et obligations des fonctionnaires »,

1984-86 la création des fonctions publiques territoriale et hospitalière.

La déconstruction secteur par secteur

Mais on assiste depuis longtemps à une déconstruction des  acquis sociaux et économiques au bénéfice du patronat et des puissances financières :

La sécurité sociale :

1967 : ordonnances Jeanneney sur la gestion de la Sécurité sociale : suppression des élections des

représentants salariés et rentrée du patronat à parité  aux CA des caisses;

1980 : création des secteurs 1 et 2;

1989 : loi Evin, entrée des assureurs privés dans la complémentaire maladie;

1996 : ordonnances Juppé, possibilité donnée aux assureurs privés d’expérimentation de réseaux de soins (projet stoppé par L .Jospin en 1997);

2002-2005 : politique d’exonérations de charges sociales pour les entreprises (Raffarin-Fillon);

2004 : loi Douste Blazy, les complémentaires participent à la gouvernance de la SS, augmentation du reste à charge (hausse du forfait hospitalier, dépassements d’honoraires, déremboursement des médicaments);

2007 : plan hôpital de Mattéi, démantèlement du secteur hospitalier, organisation du « trou de la sécu »;

2009 : loi Bachelot, « Hôpital Patients Santé Territoire », création des ARS (Agences Régionales de la Santé);

 Les retraites :

1993 : réforme Balladur : l’  âge légal de départ à la retraite est repoussé à 65 ans, la base de calcul dans le   privé passe des 10 aux 25 meilleures années, indexation sur les prix et non plus sur les salaires;

1994 : loi Madelin : fonds de pension défiscalisés pour les artisans et commerçants;

1995 : tentative de Juppé d’aligner les régimes spéciaux et des fonctionnaires sur le régime général, tentative ; mise en échec par les grèves;

2003 : réforme Fillon : 40 annuités pour tous en 2008, 41 annuités en 2012…, la décote;

2008 : Xavier Bertrand : alignement des régimes spéciaux sur le régime général;

2012-2013-2014 : durée de cotisation portée à 43 annuités à partir de 2020, relèvement progressif du taux de  cotisation de 0,30%, report au mois d’octobre de la revalorisation des retraites et pensions (sauf les très petites), fiscalisation du complément pour avoir élevé 3 enfants ou plus…

 L’économique :

1946, R.Pleven : droit pour les banques d’affaire de devenir banques de dépôt;

1967, M.Debré : droit pour les banques nationalisées d’entrer en bourse;

1968 : obligation de verser les salaires sur un compte bancaire (accords de Grenelle) d’où enrichissement des banques de dépôt;

1973 : Giscard d’Estaing fait interdire la possibilité pour l’Etat d’emprunter auprès de la Banque de France et ouvre le capital des banques publiques aux salariés;

1984, Bérégovoy: réforme du marché financier, déréglementation, l’économie plonge dans l’ère de la finance mondialisée;

1986-88, ( cohabitation avec Chirac) : privatisation du CCF, de la Société Générale, de Paribas, de Suez;

1988 la gauche tente de reprendre le contrôle de la société Générale;

A partir de 1991 reprise des privatisations à droite comme à gauche; de 1986 à 1991 l’essentiel du secteur bancaire et financier est retourné au privé (D. Strauss-Khan achève le travail).

Le 1er janvier 2009, les banques privées obtiennent  le droit d’ouvrir des livrets A (au détriment du financement du logement social).

 Les services publics :

Fin des années 80, entrée des entreprises privées dans la téléphonie mobile;

1991, P.Quilles : réforme des PTT scindés en la Poste + France Télécom;

1994, Bouygues entre dans la téléphonie mobile, modification tarifaire à la SNCF (la demande fera le prix);

1996, ouverture des marchés de l’énergie à la concurrence pour les gros clients;

1997, D.Strauss-Khan : privatisation de France Télécom;

1997 : création de Réseau ferré de France ( séparation réseau/exploitation ) pour pouvoir ouvrir l’exploitation au  privé;

2002, Jospin, Strauss-Khan : ouverture à la concurrence du marché de l’énergie (traité de Barcelone), séparation de EDF et GDF;

2004, Sarkozy : réforme des statuts de EDF et GDF, entrée en bourse;

2007, Sarkozy : privatisation de GDF, fusion avec Suez;

2010, loi Nome : impose à EDF de céder à prix coûtant 55% de sa production d’électricité nucléaire…

 Les droits des salariés :

1983, Fabius, Delors : échelle mobile des salaire cassée, droit du travail assoupli;

1984 : allègement des contraintes pour le patronat, renégociations des droits d’assurance chômage,

introduction de la flexibilité;

2008 : statut de l’auto-entrepreneur…

 La presse :

1947 : le privé entre à 50% dans le capital de France Soir, Elle, France Dimanche..et Combat est racheté à 50 % par l’homme d’affaire Henri Smadja.

CAMUS quitte son poste :
« Nous étions désarmés, puisque nous étions  honnêtes. Cette presse, que nous voulions digne et fière, elle est aujourd’hui la honte de ce malheureux pays. Mais quelque chose reste, du moins, c’est la fraternité que quelques hommes ont scellée dans le danger et l’effort quotidien.»
Lettre à Touratier août 1948. 

Appel des résistants aux jeunes générations, 8  mars 2004

Au moment où nous voyons remis en cause le socle des conquêtes sociales de la libération, nous, vétérans des mouvements de résistance et des forces combattantes de la France libre (1940-1945), appelons les jeunes générations à faire vivre et retransmettre l’héritage de la résistance et ses idéaux  toujours actuels de démocratie économique, sociale et culturelle.

Soixante ans plus tard, le nazisme est vaincu, grâce au sacrifice de nos frères et sœurs de la Résistance et des nations unies contre la barbarie fasciste. Mais cette menace n’a pas totalement disparu et notre colère contre l’injustice est toujours intacte.

Nous appelons, en conscience à célébrer l’actualité de la Résistance, non pas au profit de causes partisanes ou instrumentalisées par un quelconque enjeu de pouvoir, mais pour proposer aux générations qui nous succéderont d’accomplir trois gestes humanistes et profondément politiques au sens vrai du terme, pour que la flamme de la Résistance ne s’éteigne jamais.

Nous appelons d’abord les éducateurs, les mouvements sociaux, les collectivités publiques, les créateurs, les citoyens, les exploités, les humiliés à célébrer ensemble l’anniversaire du programme du Conseil national de la Résistance ( CNR ) adopté dans la clandestinité le 15 mars 1944 : Sécurité sociale et retraites généralisées, contrôle des «  féodalités économiques »,droit à la culture et à l’éducation pour tous, presse délivrée de l’argent et de la corruption, lois sociales ouvrières et agricoles, etc. Comment peut-il manquer aujourd’hui de l’argent pour maintenir et prolonger ces conquêtes sociales , alors que la production de richesses a considérablement augmenté depuis la libération, période où l’Europe était ruinée ? Les responsables politiques, économiques, intellectuels et l’ensemble de la société ne doivent pas démissionner, ni se laisser impressionner par l’actuelle  dictature internationale des marchés financiers qui menace la paix et la démocratie.

Nous appelons ensuite les mouvements, partis, associations, institutions et syndicats héritiers de la Résistance à dépasser les enjeux sectoriels et à se consacrer en priorité aux causes politiques des injustices  et des conflits sociaux, et non plus seulement à leurs conséquences, à définir ensemble  un nouveau « programme de résistance » pour notre siècle, sachant que le fascisme se nourrit toujours du racisme, de l’intolérance et de la guerre, qui eux- mêmes se nourrissent des injustices  sociales.

Nous appelons enfin les enfants, les jeunes, les parents, les anciens et les grands parents, les éducateurs, les autorités publiques à une nouvelle insurrection pacifique contre les moyens de communication de masse qui ne proposent comme horizon pour notre jeunesse que la consommation marchande, le mépris des plus faibles et de la culture, l’amnésie généralisée et la compétition à outrance de tous contre tous. Nous n’acceptons pas que les principaux médias soient désormais contrôlés par des intérêts privés, contrairement au programme du Conseil national de la Résistance et aux ordonnances de 1944.

Plus que jamais, à ceux et celles qui feront le siècle qui commence, nous voulons dire avec notre affection : « Créer,  c’est résister. Résister c’est créer. »

 Signataires. Lucie AUBRAC, Raymond AUBRAC, Henri BARTOLI, Daniel CORDIER, Philippe DECHARTRE, Georges GUINGOIN, Stéphane HESSEL, Maurice KRIEGEL-VALRIMONT, Lise LONDON, Georges SEGUY, Germaine TILLON, Jean Pierre VERNANT, Maurice VOUTEY

Notes

CRHA « Citoyens Résistants d’Hier et d’Aujourd’hui » : association créée en 2010 suite aux diverses interventions hautement médiatisées de Sarkozy visant la récupération des hauts lieux de la Résistance, en particulier du plateau des Glières (voir le site www.reseau-citoyens-resistants.fr).

Gilles Perret en est un des membres fondateurs.

** Le Front National 1941-1945

   L’appel initial à la formation de ce front a été lancé par le parti Communiste en mai 1941. L’appel du 10 juillet 1940 proclamait : « Jamais un grand peuple comme le nôtre ne sera un peuple d’esclaves…c’est dans le peuple que résident les grands espoirs de libération nationale et sociale. ».

Crée le 15 mai 1941 par Jacques Duclos et Georges Politzer le Front National a été le principal mouvement de la Résistance clandestine. En 1943 Pierre VILLON en devient le Secrétaire National et cette formation est reconnue à Londres. Les FTP en sont l’organisation militaire.;

Le Front national, implanté dans les deux zones, va structurer les différentes couches de la société ( Front des médecins ,de la justice, de la police, de la gendarmerie, des arts, des écrivains ,du cinéma, des paysans, des étudiants…) On y trouvera des personnalités comme le Pr Debré, Mme Albwachs-Basch, Raymond Leibovici, A.Le Personnic, François Mauriac, père Philippe provincial des carmes à Paris, Henri Wallon, F. Jolliot Curie, Ernest Perny vice président du parti radical républicain et radical socialiste…

Le Front National crée en 1941 a cessé d’exister en 1945 après la Libération.

Le seul héritage qui perdure avec difficulté : « Les Lettres Françaises » publiées au départ clandesti- nement sous l’occupation par le « Front National des écrivains » animé par Louis Aragon. La publica- tion sera interrompue de 1972 à 1990 puis de 1993 à 2004.

L’appellation Front National fut usurpée en 1972 par l’organisation fasciste «  Ordre nouveau » et ensuite accaparée sur décision de justice par Le Pen.

Texte élaboré pour la FSU par Maurice Bainvel et Anne Mesnier (avril 2014);

Sources principales :

le livre « Les jours heureux », auteur : le CHRA, éditeur : La Découverte/Poche

sur internet : Wikipédia,  programme du Conseil national de la Résistance, mise en oeuvre.

Pour compléter l’information (sur internet) :

—     « C.N.R. –  Anacr »   ( Anacr : Association Nationale des Anciens Combattants de la Résistance)

  • « entretien avec Robert Chambeiron – charles-de-gaulle.org » (par Paul-Marie de La Gorce)
  • « entretien avec Daniel Cordier – charles-de-gaulle.org » (par Paul-Marie de La Gorce)
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